Il arrive régulièrement que l’on rencontre des pratiquants déçus par l’aïkidō. La discipline n’a pas correspondu à leurs attentes, leur idéal de pureté a été floué par un professeur ou des pratiquants n’incarnant que l’expression d’un ego surdimensionné ...
Cela est certainement malheureux, car nombreux sont ceux qui ont néanmoins pu goûter les bénéfices de cette pratique.
Aussi, on se retrouve souvent à blâmer les « mauvais professeurs » et les « pratiquants ineptes » qui n’ont « rien compris au film ».
Il me semble, a contrario, que ces derniers expriment simplement une faille qui existe dans l’aïkidō.
Cette faille est purement mécanique : les techniques de l’aïkidō ne fonctionnent pas !
Toutes les techniques ? Non ! Seulement certaines. On peut même dire qu’en fait il ne s’agit pas des techniques, mais de la manière dont elles sont effectuées. En somme, la forme ou le style sont cruciaux.
Il y a mille façons d’effectuer ikkyo. D’une certaine manière, toutes semblent acceptables. Cela dépend simplement du contexte d’étude que l’on souhaite aborder : santé, spiritualité, martialité, etc. Toutefois si l’on regarde en détails, certaines formes sont délétères et contre-productives, et ce quel que soit le but visé.
En effet, si dans son essence combative une technique ne fonctionne pas, il va falloir, pour la faire fonctionner mettre en place tout un ensemble de faux-semblants.
Ces artifices sont en général l’emploi de la force brute, le non respect du schéma articulaire du partenaire, l’hyperactivité de uke (qui comble les manques de tori), ou encore la justification de certains mouvements en faisant référence à un univers fantasmé (avec des réflexions du genre « oui, mais si on devait vraiment se battre ... »).
Ces artifices créent énormément de tensions chez le pratiquant. En effet, il existe un niveau de conscience où le professeur, comme les élèves, sont parfaitement au courant que ce qu’ils pratiquent ne fonctionne pas. Mais cela est très douloureux à admettre. À la fois parce que l’aïkidō o incarne un idéal, mais aussi parce que souvent le temps de pratique investi est considérable (on parle de décennies !). Et cela crée des tensions car l’outil ne tient pas ses promesses, alors qu’on sent qu’il le pourrait.
L’élève au fond de lui a des doutes sur la validité de l’outil et lorsqu’il s’en ouvre au professeur, ceux-ci sont régulièrement balayés par des justifications du genre : « oui, mais on ne cherche pas à se battre, on recherche ... [insérer ici, au choix : l’harmonie, la relation à l’autre, à apprendre quelque chose sur nous-mêmes] et donc la forme importe peu ».
Je suis résolument contre ce genre de propositions dissonantes. La forme est fondamentale. C’est par l’intermédiaire de la forme que l’on accède au fond. C’est elle qui oriente notre esprit dans une certaine direction et nous pousse à travailler sur nous-mêmes. Nous savons bien, au fond de nous, que nous harmoniser à quelqu’un qui n’attaque pas vraiment, ne nous fait pas faire de véritables progrès intérieurs. De même, pratiquer une technique qui n’éveille en nous a … plus lisez dans l'édition 71FR